SÉANCE PLÉNIÈRE Discours de Marc HORVAT
CONSEIL RÉGIONAL DU LIMOUSIN
Séance Plénière du 23 juin 2014
Intervention de Marc HORVAT,
Président du groupe Europe Ecologie-Les Verts
Monsieur le Président, chers collègues,
Nous pouvons que nous féliciter d’avoir enfin pu voter cette motion de soutien à notre tissu industriel, en l’occurrence Altia. Il y avait quelque chose d’indécent ce matin à faire croire pour un petit jeu politique, qu’il puisse y avoir autre chose qu’un soutien plein et entier au maintien des savoirs faire en région. Mais la question du mode de développement reste entière, et ce n’est pas dans l’urgence qu’on bâtit un projet ou un maintien de l’industrie.
Je profite de cette date un peu particulière de cette séance plénière, à mi-chemin des commémorations du 70ème anniversaire du débarquement de Normandie il y a quelques jours et celles dédiées aux cent ans de l'attentat de Sarajevo, dans quelques jours, pour rendre hommage aux victimes des deux grandes boucheries européennes, mais surtout faire un rappel de la responsabilité des élus des démocraties en paix à ne pas laisser s'instaurer des régimes et des idéologies prônant la haine de l'autre et la résolution des conflits par la violence. Et pour cela, l'éducation populaire, la pédagogie et la clarté des décisions et des actions des gouvernements et des politiques en général en sont le socle.
Mettre en œuvre des réformes et des chantiers collectifs est une nécessité, mais les rendre accessibles au plus grand nombre est un devoir. Le Limousin, la France et l'Europe ont besoin de ces d'objectifs clairs, de chantiers partagés par le plus grand nombre, d'une vision d'un futur possible où les citoyens peuvent s'investir et trouver dans les objectifs la réalisation de leurs aspirations. Et cela à toutes les échelles de la décision, dans une arborescence de la dynamique partagée. Plutôt que de laisser les grands chantiers d'autoroutes et la ré-industrialisation à un petit moustachu hargneux, il y a besoin de s'emparer de l'avenir, de manière claire, sans sous-entendu discutable et prendre le temps de la pédagogie.
Sans aucun doute, la transition énergétique est un de ces grands chantiers. Si nous ne pouvons que la soutenir, et des avancées que le projet de loi promet, annoncer dans le même texte le maintien, sous forme de plafond, des 63,2 gigawatts de nucléaire, et en même temps un objectif de 40% d'énergies renouvelables, peut sembler une incohérence, voire pris au pied de la lettre une incitation à consommer un tiers d'électricité en plus. Le même texte qui par ailleurs prône des économies d'énergie dans les bâtiments, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, même si manifestement, les arbitrages ont déjà fait la part belle à d'autres financements, CICE et pacte de responsabilité notamment.
De même que ce matin, la ministre de l’environnement fléchait la taxe poids lourds sur la réparation des routes plutôt que sur la transition écologique. Il y a là quelques ombres à dissiper pour en faire un objectif commun aux acteurs économiques, aux particuliers et au climat, de l'avenir duquel nous dépendons et que les récentes allégations du GIEC assombrissent. Il en va de l'avenir industriel et artisanal de l'Europe, et il en va aussi du pouvoir d'achat, ou plutôt de la prospérité de tous nos concitoyens. Faut-il rappeler qu'en Europe, d'autres pays sont beaucoup plus avancés que le nôtre, et qu'un objectif minoré mettrait en péril l'avenir économique du Limousin, dont l'état énergétique de nos bâtiments, y compris nos lycées et collèges laisse à désirer. C'est un choix d'arbitrage que nous aimerions retrouver dans la DM qui nous est proposée.
A l'inverse, encore une fois, ce sont les entreprises les plus puissantes que nous aidons, avec les contributions des TPE, PME et artisans. Nous seront particulièrement vigilants, dans ce sens, à ce que l’engagement de campagne, que nous avons proposé puis pris ensembles à la création de cette majorité, à savoir la création d'une « foncière agricole », et qui sera présenté tout à l'heure comme la création d'un fonds d'acquisition du foncier agricole de 2,47 millions d'€ sur trois ans, réponde aussi à cet autre engagement que nous avons porté dans cette majorité, c'est à dire la conditionnalité des aides, et que l'argent public aide l'installation de projets d'agriculture locale respectueuse de l'environnement, au minimum en cohérence avec le plan régional d'agriculture durable.
Quant à la réforme territoriale, que nous appelons de nos vœux, comment rendre opaque ce qui ne devrait justement pas l'être ? Si rien n'est parfait, le mode électoral et l'organisation des régions avec ses services compétents devrait plutôt faire penser qu'une réforme devrait d'abord s'attacher à clarifier et à simplifier les autres composantes du mille feuille territorial, même si la liberté de revoir la carte régionale pourrait être envisagée, quoi de plus naturel que de laisser les deux Normandie se regrouper. Mais décider sur un coin de table à Paris le devenir du Limousin, inclus dans une grande région « poichenli », « poicentrousin » ou « police », sans métropole ni cohérence aucune démontre pour le moins une certaine arrogance, voire un mépris qui ne fera pas monter les sondages d'opinion. Là où un renforcement des régions paraît nécessaire et une part de loi qui nous est proposée l’affirme, le ministre de l’intérieur clarifie la position du gouvernement dans le monde : "Avec moins de régions, nous devons absolument réorganiser l'administration avec un maillage qui garantisse la présence de l’État et des services publics au plus près des territoires, notamment à l'échelon départemental, et leur montée en gamme, avec davantage de pouvoir aux préfets. " La messe est dite, il fallait attendre un ministre de gauche pour s'en prendre à la décentralisation .
Notre position, qui avait été qualifiée de plus cohérente par la commission Balladur, propose une assemblée d’intercommunalités au niveau des pays, avec une part importante de proportionnelle, la suppression des départements et le renforcement des régions que nous soutenons dans la loi, deux niveaux cohérents assurant la compétence générale et le pouvoir réglementaire sur le territoire régional.
Par ailleurs, nous nous étonnons de voir déposé en 7ème commission une délibération s'opposant à la carte du gouvernement quand vous aviez annoncé, M. le Président une motion du parti socialiste. C'est faire un usage étrange de cette majorité et de cette assemblée. Nous ne prendrons pas part au vote, considérant que la question de fond n'est pas de savoir avec quelle région nous devons diluer le Limousin, mais plutôt quelle réforme démocratique mener pour rendre confiance aux citoyens. Or ce qui est proposé tient du double langage, un renforcement des régions essentiellement sur les domaines économiques, et un renforcement de l'état sur la proximité, le contraire de la décentralisation, surtout après avoir fait la loi sur les métropoles. Est-il donc si difficile de présenter un schéma cohérent reprenant les strates démocratiques et administratives qui permettent aux français et aux limousins de savoir comment est administré ce pays, et comment est pris en compte leur avis et leurs aspirations, et leurs impôts ?
Lénine avait dit « tous les moyens sont bons pour la révolution » et Antonio Gramsci lui avait répondu « tous les moyens ne sont pas bons car ils conditionnent l'avenir ». Il en va de même pour les réformes.
Je vous remercie
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