discours de Marc Horvat, session du Conseil Régional du 22 juin 2015
Retrouvez ci-dessous l'intervention de Marc HORVAT, Président du groupe EELV, en ouverture de la session du Conseil Régional du 22 juin 2015.
« Mesdames, Messieurs, mes chers collègues. Je voudrais saluer la présence des salariés du Conseil Régional. Il y a peu, Monsieur le Président, nous avions acté une suspension de séance pour que les groupes ici présents à l'assemblée puissent recevoir les représentants de la Confédération Générale du Travail. Il me semble aujourd’hui que ce serait aussi le moment de laisser la parole aux salariés, au vu de leur présence ce jour en assemblée. Je propose, Monsieur le Président, une suspension de séance, pour que nous puissions recevoir NOS salariés.
[réponse hors-micro du Président du Conseil Régional, invitant à terminer les interventions des groupes dans un premier temps]
Monsieur le Président, chers collègues,
Je m'associe aux propos de bienvenue en direction de tous les nouveaux élus du Limousin, et tout particulièrement je me permet de vous présenter Estela Parot-Urroz, membre du parti occitan, à qui, je l’espère, on laissera latitude pour enfin mettre le Limousin à niveau en termes de diversité linguistique, au niveau des autres régions d'origine culturelle occitane.
En lui souhaitant, en vous souhaitant, la bienvenue et une fin de mandature riche en expériences et en échanges. Par contre, vu l'état déjà très avancé de notre région, je ne suis pas en mesure de vous dire où se trouvent les bouées de sauvetage.
D'ailleurs, Monsieur le président, à ce sujet, concernant les bouées de sauvetage, est-il le moment de vous rappeler votre responsabilité, autant formelle que morale, en tant qu'employeur de plus de 1500 salariés, sur leur devenir, la localisation de leur emploi et les tâches qui leur seront attribuées.
Il est en effet un peu dégueulasse, tout cela parce qu'à Paris on a décidé de colorier à nouveau les cartes de France, que des centaines de personnes ne sachent toujours pas à ce jour quel est leur devenir, alors qu'on nous demande de nous positionner sur les politiques d'une grande région pour laquelle, je vous rappelle, nous n'avons aucunement été mandatés par le peuple du Limousin qui nous a élus.
Vivre en famille dans la périphérie de Limoges, et c'est bien l'attrait de cette magnifique région, ce n'est pas du tout la même chose que de devoir s'entasser dans un appartement à Bordeaux. Je cite tout simplement des propos tenus par trois de nos salariés. Surtout pour les accédant à la propriété, dans un paysage immobilier plus que morose, que le départ des 1000 agents de l'état ne va certainement pas améliorer.
Votre mandat, notre mandat, est à ce jour encore de représenter, de défendre la population et les territoires de notre région, faire en sorte que les minorités, quelles qu’elles soient, pour peu qu'elles fussent républicaines, aient le droit d'exister.
A croire que ce gouvernement, qui nous met devant le fait accompli et nous oblige à ce tour de passe-passe démocratique, a décidé, ceci dans la continuité des précédents, de finir le démontage pierre par pierre du rempart de l'édifice moral à l'origine de la république et de la démocratie.
Le sort de vos salariés en est un exemple. L'extraordinaire position de la France au sein de l'Europe au sujet des réfugiés en est un autre. Voila des populations entières en danger de mort - des humains comme nous - qui cherchent refuge en Europe, le droit de survivre, le droit d'échapper au chaos et à la barbarie auxquelles elles tentent de tourner le dos. Les températures démentielles et la chute des productions agricoles, dont le climat que NOUS avons très largement contribué à détraquer, n'est pas la dernière cause. Le droit de vivre en Europe, en paix, et même pas en France puisque ces populations connaissent déjà le sort indigne que notre pays leur réserve : traînées sans revenu pendant un an, un an et demi voire plus, en attendant d’hypothétiques papiers, sans logement, sans nourriture, sans traitement médical autre que celui de médecins du monde, comme dans un pays en voie de développement, la 5eme voire même la 6eme puissance économique mondiale.
Cette indignité nationale qui va finir par faire de nous des parias en Europe, cette France qui tente jusqu'au bout de fourguer les moyens militaires les plus avancés à la Russie, les classes Mistral, des bâtiments d'intervention, des bâtiments de débarquement ; les armes les plus létales de l'histoire de l'humanité à la poudrière du Golfe, dont aucun expert à ce jour n'est capable de prédire un avenir dépassant six mois. On a doublé les exportations d'armements dans les pays ou les mots démocratie ou droit de l'homme n'ont pas même de traduction.
Fournir des armes à des dictatures : n'a-t-on pas assez appris de la théorie du containment américain ? Et il se trouve, au nom de la croissance et de l'emploi, des gens pour s'en réjouir. Il se trouve même des Ministres pour se réjouir aussi, hors de tout cadre juridique, de proposer la surveillance généralisée sans limite de nous tous, en faire un texte de loi, l'écrire ! Un gouvernement de gauche qui propose la surveillance sans limite de tout étranger. Cela pue tellement les remugles du fascisme que je me demande comment cela ne vous fait pas froncer les ailes du nez.
Et la cerise sur le gâteau, dans un pays qui compte 3 millions et demi de chômeurs, après les « expérimentations » de contrôle accru des chômeurs, c'est cet amendement qui se voulait discret du gouvernement, pour donner les moyens de police et de renseignement aux salariés de pôle emploi, les écoutes téléphoniques, les détournements de courrier et le contrôle bancaire. Comme si les les 5,6 million des trois catégories de sans emploi ne devaient pas déjà aujourd'hui subir les tracasseries administratives, les radiations pour un oui ou un non, pour une signature oubliée ou un refus de stage bidon. Encore une fois, ce sont des propos qui m'ont été tenus par des chômeurs.
Admettons qu'il y eu 100 000 feignasses invétérées, 200 000 abattus qui abandonnent la lutte à force d'être renvoyé à leur image de trop vieux, trop jeunes, trop femme avec enfant, trop femme sans enfant parce qu'il y a le risque qu'elles puissent en avoir un jour... 500 000 sans espoir, en admettant qu'il y en ait autant, sachant que 5 autres millions se lèvent chaque matin dans l'espoir de décrocher LE poste.
A quoi servent toute cette tracasserie et cette surveillance ? Est-ce moral ? Parce-que le chômage tue ; Monsieur Macron, qui ne l'a manifestement pas connu, doit le savoir. Le chômage rend dépressif, c'est un véritable traumatisme, avec une morbidité tout à fait singulière six fois supérieure à la population moyenne. Et quand il y aurait licenciement abusif, ce ne seraient que des indemnités contractualisées, une clause pénale explicite dans le contrat de travail, un plafond quelles que soient les conditions qui ont emmené un citoyen dans la spirale du repli sur soi, de l'addiction, de la précarité et du suicide. Comment une république peut-elle traiter ses citoyens de cette manière ?
Alors, en plus de vous souhaiter sincèrement la bienvenue, chers nouveaux collègues, je vous invite à y penser, quand dans une rue désertée d'un dimanche matin, défilant derrière la fanfare municipale pour rendre hommage aux résistants d'hier, je vous invite à penser et à repenser votre capacité de résistance, surtout ceux qui partagent le parti qui compare le désespoir de peuples entiers à des problèmes de canalisation... sans préciser bien entendu s'il s'agit de canalisation d'alimentation d'eau ou d'évacuation. Mais ce qui est sur, c'est que l'odeur qui se dégage de ces propos ne laisse aucun doute sur la couleur.
L'Europe sombre, le navire démocratique prends l'eau, la France cours après les électeurs du FN, et les chômeurs continuent d'espérer, ou de désespérer. Entre dérèglement climatique et l'iceberg fasciste, est-ce que quelqu’un ici croit encore sincèrement à la croissance qui résout tout? Est-ce qu'il n'est pas vraiment temps de changer la donne ?
Merci »
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